Le réveil

Je me réveille et déjà l'amoureux dit que je ne l'aime pas beaucoup en ce moment. Je me demande si je tiens déjà moins à lui. je crois qu'il se trompe. Je ne déteste que moi.

l'amie d'enfance

Je réfléchis. Je pense à J. A notre soirée de la veille. Beaucoup bu. Des bières. Nous nous sommes retrouvés vers 19h. Dans l'arrière salle d'un bar. Des jeunes jouaient de la musique. Des étudiants en art déco a qui le patron prête l'arrière salle pour répéter. Du jazz. Une contrebasse. Une clarinette. Un batteur sans batterie. Le demi à 1euro 50. 4h plus tard je me suis effondrée. Ai dormi comme dorment les alcooliques. Je suppose. Un sommeil lourd. Un peu collant. Abrutissant.

Je me sens toujours mal après avoir vu J.

J. est ma seule amie d'enfance. Nous sommes diamétralement opposée. Je ne suis pas sûre de l'aimer. J'y suis attachée.

J. prépare une thèse sur la littérature née des camps de concentration. L'horreur c'est son dada. Si quelqu'un se demande comment on peut en arriver là, à ne lire que des récits sur l'inhumanité d'une époque, la réponse est simple: c'est une histoire de famille.

Le père de J. est né en belgique. 1936. Dans une famille juive. Il a connu les camps. La plupart des siens sont morts là bas. Dans les années 60, il rencontre la mère de J. Elle est sculptrice. Allemande. Née dans un famille nazi devenue nostalgique. Ils se marient. Ils font un premier enfant. Un fils

Le père est écrivain. Un intellectuel. Reconnu. La mère est une artiste. Maudite . Un peu folle.

Ils font un deuxième enfant. 5 ans plus tard le père meure. Cancer du poumon. Le fils est devenu cancerologue. La fille universitaire.

Le premier amour

Déjeuner avec P. Il raconte. Sa rupture. Le suicide d'un ami. Sa mention très bien en Harmonie au conservatoire. Le voyage au brésil. Le piano qu'il n'a plus le temps de travailler. Il a cuisiné un bœuf bourguignon, nous sert du vin. Il a perdu l'habitude de mes silences. Mais il fait ce qu'il peut. Je lui en suis reconnaissante.

Il a acheté des laitières à la vanille.
"je me suis souvenue de ta passion monomaniaque pour la vanille quand tu avais 15 ans"

J'avais oublié. Je me souviens à présent. De mes 15 ans. Avec lui. Nous étions amoureux et j'aimais la vanilleP. voulait devenir pianiste jazz. Moi écrivain. Adolescents. Paumés. Rêveurs. Protégés. Nous partions en vacances dans la maison de ses parents à Belle île. En week dans la maison de campagne de ma famille. Nous avions notre bande " de copains" . En réalité nous étions seuls. Recroquevillés dans notre histoire. Une belle histoire. Deux ans.

Après la rupture et des temps difficiles, nous sommes devenus amis. Un premier amour cela ne s'oublie pas.